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lundi 27 novembre 2023

La position des manchettes GC (1917)

 

L’année 1917 est la plus riche en échantillons ce qui reflète le fait que les timbres se vendaient moins et/ou qu’un tirage trop important a été réalisé cette année-là.

Les échantillons ont été classés comme pour l’année 1916 en fonction de la position des lettres G et C par rapport au « i » de république. Toutefois ce classement n’était pas suffisant car pour l’année 1917, j’ai pu obtenir des images de blocs de 50 haut de feuille qui m’ont permis de déterminer s’il s’agissait de la partie gauche ou de la partie droite de la feuille d’impression initiale de 300 timbres. Il s’est avéré que dans un même groupe je retrouvais des feuilles de vente « gauche » et « droite ». J’ai donc utilisé la clé de détermination secondaire définie précédemment à savoir la position des lettres GC par rapport au filet extérieur du timbre. Dès lors j’ai pu identifier les demi formes d’impression dans le détail contrairement à 1916 où je n’avais pas d’image de grands blocs haut de feuille. Les résultats montrés dans le tableau 2 montrent l’existence de 8 demi forme d’impression ce qui sous-entend l’existence de 4 formes d’impression donc de 4 presses en activité et donc une production plus importante de ce timbre cette année-là.

 

Tableau 2 : Mesures obtenues sur 61 millésimes de 1917 avec manchettes GC.

Chaque couleur regroupe les échantillons issus d’une même demi forme d’impression supposée.

 

Sur les 61 millésimes analysés, 28 présentent une usure plus ou moins prononcée sur la partie haute des lettres soit plus de 46%. Cela suggère que les formes d’impression utilisées en 1916 ont continué à l’être en 1917 d’où l’usure des caractères d’imprimerie. Les liens possibles entre les années 1916 et 1917 en fonction des positionnement verticaux et horizontaux des lettres G et C sont identifiés par des couleurs similaires (gris, bleu, jaune, vert clair). Toutefois l’échantillonnage de certaines nouvelles demi formes de 1917 est trop faible (vert et vert foncé) pour être totalement fiable (Tableau 3).

 
Tableau 3 : nombre de caractères usés pour chaque demi-forme identifiée en fonction des années d’utilisation.

              L’existence de blocs de 50 timbres Haut de feuille (HDF) de vente de 150 timbres avec manchette GC de 1917 permet de constater que sur les 4 demi formes identifiées en 1917 et déjà présentes en 1916, 2 ont donné les parties droites des feuilles de vente (gris et jaune) et une autre la partie gauche (bleu). Il semble donc probable que la demi forme vert clair corresponde à une partie gauche. On aurait bien ainsi 2 formes d’impression communes entre 1916 et 1917.

Concernant les 4 autres demi formes spécifiques de 1917, on retrouve une de gauche et une de droite (violet clair et orange) alors que les 2 autres sont indéterminées mais pourraient bien être « complémentaires elles aussi (vert et vert foncé).

En conclusion on peut dire que sur les 8 demi formes identifiées en 1917, 4 existaient déjà en 1916 et ont poursuivi leur cycle de vie en 1917. Elles constituaient donc 2 formes d’impression complètes. L’existence de 4 autres demi forme suggère qu’il y a eu 2 presses supplémentaires en activité et donc une une volonté d’imprimer une quantité plus importante de timbres en 1917 ce qui se traduit par le nombre plus élevé d’échantillons retrouvés de nos jours.

L’obtention d’autres images de blocs HDF ou de simples millésimes avec manchette GC permettront d'étoffer l'échantillonnage et de coupler ces demi formes entre elles. N’hésitez pas à m’envoyez vos scans si vous avez de telles pièces que ce soit pour les années 1916 et 1917 mais aussi pour les suivantes dont je parlerais dans un prochain article .... affaire à suivre !


 

mercredi 22 novembre 2023

La position des manchettes GC (1916)

De 1916 à 1920, l’impression des timbres s’est faite majoritairement sur du papier de mauvaise qualité en raison des restrictions économiques liées à la guerre. Ce papier dit de « Grande Consommation » était produit à partir de bois brut avec son écorce d’où une coloration beige à chamois très foncé suivant la teneur en tanins. Les feuilles de vente de 150 timbres imprimées sur ce type de papier portaient les lettres « GC » en haut et en bas de chaque feuille afin que les postiers en prennent soin car il se déchirait (trop) facilement (Fig 1).

Fig 1 : Schéma d’une forme d’impression composée de 6 galvanos de service. Après l’impression, les feuilles de 300 timbres sont coupées en 2 (trait rouge vertical) pour donner des feuilles de vente de 150 timbres. Chaque feuille de vente est l’image de la moitié de la forme d’impression (demi forme gauche et droite). Les lettres GC sont positionnées au-dessus du timbre 5 et en dessous du timbre 145 de chaque feuille de vente.

L’impression des lettres « GC » se faisait de la même couleur que le timbre. On peut donc en déduire qu’elles étaient fixées sur formes d’impression de 300 timbres (4 couple de lettres par forme). Ces lettres étaient positionnées en dehors des galvanos de service sur la forme d’impression (ou cliché). On peut donc penser que ces lettres étaient soit :

1)      Gravées sur une fine plaque de laiton ou de cuivre puis le tout était fixé sur la forme d’impression

2)   La forme était perforée sur son épaisseur et des caractères d’imprimerie était glissés dedans à l’image des millésimes puis fixés à la forme.

La première hypothèse sous-entend que la surépaisseur due à la plaque de cuivre avec relief des lettres aurait généré des traces autour des lettres GC lors d’encrage trop fluides à l’image des têtes de vis de fixation des galvanos (Fig.2). Cela a été plus ou moins observé une fois sur un bas de feuille ayant subi un gros défaut d’impression (Fig.3). Il semble quasi impossible de trancher objectivement entre les 2 hypothèses même si ma préférence va sur la perforation de la forme et l’insertion de caractères d’imprimerie. Cette technique était déjà utilisée en routine pour les millésimes et les indications des jours d’impression, des numéros de presse ou des indicatifs de chef de machine en bas de feuille. Elle reste donc pour moi la plus probable.

Fig.2 : empreinte encrée de la vis de fixation présente sur la forme d’impression

Image empruntée sur le site de « semeuse13 »

 

Fig. 3 : Bas de feuille avec manchette GC où l’on observe un gros défaut d’impression en bas de feuille et une trace verticale d’encre qui pourrait suggérer la présence du bord vertical d’une plaque (Image « semeuse13 »)

 

Quelle que soit la technique utilisée, le positionnement de ces lettres ne peut pas être parfaitement identique d’une forme à l’autre à l’image des différences de positionnement et d’inclinaisons observées avec les millésimes dans une feuille de vente (ou de roulette). De plus sur une même forme, les 2 emplacements du haut (et du bas) ne doivent pas être positionnés exactement au même endroit. Sur ce dernier point, on ne peut qu’émettre l’hypothèse puisque toutes les feuilles de 300 timbres étaient recoupées en 2 feuilles de vente de 150 et il est donc impossible de prouver quoi que ce soit de nos jours. En revanche, pour les feuilles de ventes de 150 timbres, il existe encore de nombreux millésimes haut de feuille avec les « manchettes GC » (Fig.4). En conséquence, on peut mesurer le positionnement de ces lettres par rapport à un point fixe du timbre situé en dessous et en déduire le nombre minimal de forme d’impression existant à cette époque pour la Semeuse 5 centimes verte.

 

Fig.4 : Millésime 7 de la Semeuse 5 centimes verte avec manchette GC en haut de feuille

 

     I.          Le matériel et la méthode

 

1)        Le matériel

 Pour réaliser cette étude, je suis parti de 160 scans de millésimes de la Semeuse 5 centimes verte avec manchette GC au-dessus fournis par différents « semeusophiles » que je remercie pour leur collaboration (semeuse13, jacques G., josé B., nicolas C., thierry B….), ceux provenant de ma propre collection et les images trouvées sur les sites de vente. Les images idéales contiennent la manchette GC mais aussi le millésime afin de dater l’année d’impression et donc de déterminer la période d’utilisation des demi-forme d’impression identifiées. Toutefois, les manchettes GC sans millésimes ont leur utilité pour confirmer ou infirmer certaines hypothèses de travail. Concernant les inscriptions GC en bas de feuille, je n’ai pas réussi à obtenir, encore, un nombre suffisant de scans pour les étudier de façon fiable. Enfin les images avec une définition trop faible ont été écartées pour éviter les mesures trop approximatives.

Ces 159 millésimes se décomposent comme indiqué ci-après :

-       28 pour 1916,

-       61 pour 1917,

-       33 pour 1918,

-       35 pour 1919,

-       3 pour 1920.

Avec ces chiffres, on retrouve bien la rareté des GC de 1920 connue de tous suggérant que l’échantillonnage est représentatif de la réalité. 

 

2)      La méthode

L’analyse est basée sur des mesures réalisées à partir de 2 points fixes du 5ème timbre des feuilles de vente. Il s’agit du « I » de république et du filet supérieur du timbre. A partir de là, le positionnement horizontal (C et G) et vertical des lettres (H) a été mesuré ainsi que la largeur globale de cette inscription (L), la largeur de chaque lettre et l’espace entre les lettres (E) (Fig.5).

Fig.5 : représentation schématique des mesures effectuées sur les manchettes GC

 

Chaque mesure a été réalisée 3 fois pour minimiser les erreurs. Pour le cas où les scans étaient de tailles variables, un coefficient a été appliquée en fonction des mesures de largeur (toujours au niveau de république française) et de longueur du timbre (toujours sous le « i » de république) sur le scan pour retrouver la valeur standard mesurée sur une épreuve d’artiste et sur une impression sur bristol à savoir 18,4 mm x 22,5 mm d’un filet à l’autre. L’outil de mesure utilisé permet d’avoir une précision de l’ordre de 0.1 mm. Pour vérifier ce niveau de précision, la largeur des lettres G et C et l’espace entre ces lettres (E) a été mesuré et déduit de la mesure globale entre le début du G et la fin du C (L). Les résultats montrent une valeur moyenne de -0.02 mm et un écart type de 0.07 mm. J’ai donc considéré que l’erreur de mesure était de 0.2 mm pour avoir une marge de sécurité.

 

     I.     Les résultats bruts cumulés de 1916 à 1920

 

1) L’absence de variabilité des lettres C et G.

Sur l’ensemble des mesures réalisées, l’écart type des largeurs des lettres C et G est respectivement de 0.14 mm et 0.20 mm donc non significatif. Concernant la hauteur des lettres C et G on a respectivement 0.29 mm et 0.33 mm d’écart type ce qui pourrait indiquer une variabilité réelle mais en fait 29 % des manchettes analysées (47/160) avaient les lettres usées sur la partie haute d’où l’apparition de cette variabilité.

2) La longueur de la manchette GC

            L’écart type sur la longueur des manchettes GC est de 0.51 mm avec des extrêmes qui vont de 18.80 mm à 21.93 mm. Il existe donc une réelle variabilité qui n’est pas corrélée à la variabilité de la largeur des lettres (Cf. ci-dessus) mais à celle de l’espace entre les lettres C et G (écart type de 0.44 mm et 2.01 mm / 3.95 mm pour valeurs minimales et maximales). Ce dernier point penche en faveur de 2 caractères d’imprimerie placés côte à côte avec un resserrement plus ou moins important entre eux. Ce critère peut donc être un candidat secondaire pour différencier les formes d’impressions utilisés.

            3) La position de la manchette GC par rapport au filet horizontal du timbre

            La distance qui sépare le bord supérieur du filet du timbre de la base des lettres C et G présente un écart type de 1.20 mm avec des extrêmes à 8.02 mm et 13.90 mm. Ce critère est donc majeur mais il faut noter que seules 8 manchettes sur 160 ont une hauteur comprise entre 8.02 mm et 10.07 mm uniquement en 1919 et 1920. Si on retire ces 8 valeurs l’écart type tombe à 0.62 mm donc à un niveau proche de celui de la longueur des manchettes GC. Il est donc significatif mais guère plus que le précédent sauf pour les formes de 1919 et 1920.

            4) La position de la manchette GC par rapport au « i » de république

            La distance qui sépare l’axe du « i » de république avec le début de la lettre G et de la lettre C est la valeur qui fluctue le plus et va donc être la plus discriminante. En effet, le début de la lettre G est positionné de 4.64 mm avant et à 3.04 mm après cet axe avec un écart type de 1.51 mm. Il en est de même pour la lettre C (entre 6.46 mm et 14.30 mm et un écart type de 1.41 mm). Que ce soit le C ou le G, son déplacement latéral varie de 7.68 à 7.84 mm par rapport à cet axe du « i ».

            Les clés de discriminations sont donc par ordre d’importance :

1)      la position des lettres G et C par rapport à cet axe,

2)      la position de la manchette GC par rapport au filet supérieur du timbre,

3)      la longueur de la manchette GC.

 

 II.            L’exploitation année par année

En utilisant les critères indiqués ci-dessus, il a été possible de classé tous les millésimes analysés en groupes plus ou moins importants.

 

1)      L’année 1916

C’est cette année-là qu’ont été apposées les premières lettres G et C sur les formes d’impression. Les résultats des mesures sont donnés dans le tableau 1 ci-dessous.

Tableau 1 : Mesures obtenues sur 28 millésimes de 1916 avec manchettes GC. En fonction du positionnement des lettres GC, ils ont été regroupés en 4 groupes homogènes.

             La position des lettres G et C par rapport à l’axe du « i » de République permet de distinguer 4 groupes distincts. Il existait donc au moins 4 demi formes d’impression en 1916 que l’on peut « baptiser » suivant le positionnement moyen des lettres G et C :

-          Demi forme grise :     -3.23 / 8.91

-          Demi forme bleu :      -2.46 / 9.52

-          Demi forme beige :    -1.57 / 10.43

-          Demi forme verte :     -0.69 / 11.15

 

On peut en déduire qu’en 1916, il existait deux formes d’impression pour imprimer la Semeuse 5 centimes verte.

Il est intéressant de noter que sur les 28 millésimes analysés, seuls 4 avaient des lettres GC plus ou moins usées sur la partie haute (Fig. 6).

Fig.6 : Les lettres GC sont en partie usées sur leur partie haute sur 4 des 28 millésimes analysés.

La manchette GC du haut est la référence intacte.

 

On en retrouve 2 sur la demi forme grise et 2 sur la demi forme bleue suggérant que ce sont les plus utilisées en 1916 et peut être la paire qui constituait une forme d’impression. On verra dans le prochain article que l’année suivante cette proportion est beaucoup plus importante. On pourra aussi observer le devenir de chaque demi forme au cours des années suivantes ... affaire à suivre ….

Dans l’immédiat je tiens à remercier tous ceux qui m'ont fait parvenir des scans indispensables pour cette étude notamment "semeuse13", "jojo" et plusieurs membres du Cercle des Amis de Marianne.